IMPROPRIETE A LA DESTINATION : DU STANDARD AU SUR-MESURE


Traditionnellement, la notion d’ « impropriété à la destination » (article 1792 du Code civil) s’appréciait objectivement (in abstracto) : selon des standards normatifs ou usuels ; par exemple : une maison doit être habitable.

Mais la jurisprudence moderne, et notamment un arrêt du 16 janvier 2025 (Cass. 3e civ., n° 23-17.265, au Bulletin), consacre une approche in concreto : la destination est celle convenue entre les parties, intégrée au contrat.

Dans cet arrêt, la Cour de cassation s’appuie sur deux piliers du droit de la construction… et confirme une tendance de fond : la subjectivisation de la destination :

La Cour affirme :

- que la destination contractuelle prime sur les standards

Ainsi, des désordres de condensation affectant la toiture d’un bâtiment agricole sur lequel une centrale photovoltaïque a été installée peuvent rendre l’ouvrage inadapté à sa « vocation » (stockage de grains), même s’il reste « fonctionnel » au sens technique.

- que le maître d’ouvrage reste maître… de sa réparation

Même si la solution technique réparatoire des phénomènes d'infiltration de la toiture proposée par le constructeur est adaptée, elle ne peut être imposée au maître d’ouvrage. La perte de confiance du maître d’ouvrage envers le constructeur constitue un motif légitime pour refuser que ce dernier n’intervienne à nouveau, ce qui arrive souvent dans les chantiers litigieux.

La Cour consacre la « subjectivisation » de la destination :

Une évolution assumée vers un droit de la construction plus personnalisé, mais aussi plus exigeant car cela a pour conséquences :

- une extension du champ de la garantie décennale

La subjectivisation de la destination conduit à une application plus fréquente de la garantie décennale.

- une imprévisibilité accrue des décisions

Les attentes contractuelles étant propres à chaque affaire, l’incertitude s’accroît pour les constructeurs.

- un renforcement de la protection du maître d’ouvrage

Le droit devient plus souple pour les maîtres d’ouvrage… mais plus risqué pour les constructeurs.


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